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” La hausse des tentatives de suicide depuis le début de l’épidémie a été observée en France et à l’étranger, notamment aux Etats-Unis.

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«Corrélation entre les tentatives de suicide et l’épidémie»

Ces différentes données sont issues d’une lettre de recherche intitulée «Tendances temporelles des tentatives de suicide parmi les enfants dans la décennie avant et pendant la pandémie de Covid-19, à Paris».

Publiée dans le Journal of the American Medical Association. Elle porte sur les enfants de moins de 15 ans, admis aux urgences pédiatriques de l’hôpital parisien Robert-Debré (XIXe arrondissement), entre janvier 2010 et avril 2021. Soit 830 enfants.

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On retrouve bien dans cette publication le chiffre de + 299 % évoqué sur CNews. Ce dernier désigne l’augmentation des admissions aux urgences de l’hôpital Robert-Debré pour tentatives de suicide chez les moins de 15 ans entre juillet-août 2019 et mars-avril 2021. Soit entre le plus bas niveau de 2019, et le plus haut niveau de 2021. Si on regarde la courbe des tendances, qui gomme les variations mensuelles, la progression est logiquement moins importante, même si la hausse reste spectaculaire. Peu avant 2020, ce chiffre avait déjà presque doublé. Depuis 2021, on compte plus de 40 admissions pour tentatives de suicide par bimestre dans l’hôpital Robert-Debré, c’est deux fois plus qu’avant 2020, et même quatre fois plus que pendant la période 2011-2017.

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«Il y a une corrélation positive entre les tentatives de suicide chez les plus jeunes et l’épidémie, mais les déterminants exacts sont inconnus.» L’étude dresse d’ailleurs plusieurs hypothèses : «De nombreux facteurs peuvent avoir contribué à cette accélération, comme la sensibilité spécifique des enfants aux mesures de prévention [mitigation], la détérioration de la santé ou de la situation économique de la famille, l’augmentation du temps d’écran et de la dépendance aux médias sociaux, ou le deuil.»

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Auprès de CheckNews, le psychiatre fait état des chiffres qui lui ont été transmis par les hôpitaux de plusieurs villes. A Rouen, on constate que les entrées aux urgences pour des TS ont presque quadruplé entre 2019 et 2020. A Marseille, il y a eu chez les moins de 15 ans deux fois plus de TS en 2021 par rapport à 2020. A Nancy par contre, si les «crises suicidaires» ont bien augmenté, ce n’est pas le cas des tentatives.

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Même constat aux EUA

Le même constat a été dressé dans d’autres pays, relève l’étude menée à Robert-Debré. Comme aux Etats-Unis, où à partir des remontées de 71% des services d’urgence du pays, les Centres pour le contrôle et de prévention des maladies (CDC) ont constaté dans la population des 12-17 ans que «par rapport aux périodes correspondantes en 2019, le taux de visites aux urgences pour des tentatives de suicide présumées [c’est-à-dire la part des visites aux urgences pour TS parmi l’ensemble des visites aux urgences] était 2,4 fois plus élevé au printemps 2020, 1,7 fois plus élevé en été 2020 et 2,1 fois plus élevé en hiver 2021. Cette augmentation est due en grande partie aux visites pour tentative de suicide présumée chez les femmes.»

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Hausse des dépressions

Quant aux autres marqueurs du phénomène suicidaire, comme les pensées noires ou les dépressions, ils semblent aussi en augmentation chez les jeunes. Un communiqué du mois de janvier de la Société française de pédiatrie s’en alarmait déjà (ainsi que de la hausse des gestes suicidaires).

Plus récemment, une note de la Drees datant d’octobre est venue confirmer le phénomène. Les syndromes dépressifs majeurs sont «supérieurs de plus de six points chez les moins de 25 ans en novembre 2020 par rapport à 2019 et de plus de deux points chez les 25-34 ans, alors qu’ils sont restés à des niveaux comparables dans les autres classes d’âge.»

 

par Fabien Leboucq, Libération, publié le 8 novembre 2021

ÉTUDE SCIENTIFIQUE

ÉTUDE SCIENTIFIQUE

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Titre

Tendances temporelles des tentatives de suicide chez les enfants au cours de la décennie avant et pendant la pandémie de COVID-19 à Paris, France

Information

Cette étude transversale utilise des données de surveillance pour évaluer les tendances temporelles des tentatives de suicide chez les enfants admis dans un service d’urgence pédiatrique à Paris, en France, dans la décennie avant et pendant la pandémie de COVID-19.

Introduction

Des études récentes ont signalé une détérioration de la santé mentale des enfants depuis le début de la pandémie de COVID-19 en 2020, avec une augmentation des troubles anxieux et de l’humeur.(1) Les taux d’idées suicidaires et de tentatives de suicide chez les enfants étaient également plus élevés lorsque les facteurs de stress ont été accrus en 2020.(2,3)

Nous avons cherché à mieux évaluer les tendances temporelles des tentatives de suicide chez les enfants tout en ajustant les fluctuations annuelles et saisonnières. Nous avons mené une étude transversale des données de surveillance recueillies au cours des 10 dernières années à l’hôpital Robert Debré à Paris, en France, qui est l’un des plus grands centres pédiatriques d’Europe.

Résultats

Les résultats des séries chronologiques désaisonnalisées ont montré que le nombre de tentatives de suicide chez les enfants est passé de 12,2 au niveau le plus bas (juillet à août) en 2019, à 7,8 pendant la première période de confinement (mars à avril) en 2020 en France (−36 % ; figure ; tableau). Cependant, le nombre de tentatives de suicide chez les enfants a considérablement augmenté, passant des niveaux les plus bas et les plus élevés de 12,2 (juillet à août) et 22,5 (novembre à décembre) en 2019, à 38,4 juste avant le deuxième déclenchement du confinement (septembre et octobre) et 40,5 ( début novembre à décembre) en 2020 (+116 % et +299 %, respectivement). Cette dynamique aberrante des tentatives de suicide était indépendante de sa saisonnalité annuelle et de sa tendance sur la période de 10 ans, comme l’illustrent les composantes de restes significatifs que nous avons observées après mars 2020. Le coefficient de pente des restes était différent de 0 (P = .003) , avec un coefficient de -0,079 (IC à 95 %, -0,13 à -0,027).

Discussion

Depuis 2010, l’incidence des tentatives de suicide chez les enfants a augmenté dans le monde.(4) Notre analyse suggère en outre une augmentation spectaculaire des tentatives de suicide chez les enfants fin 2020 et début 2021 après le début de la pandémie de COVID-19 en France.

Des résultats similaires dans la dynamique du suicide, des tentatives de suicide ou des idées suicidaires chez les enfants ont été signalés récemment.(2,3,6) De nombreux facteurs peuvent avoir contribué à cette accélération, comme la sensibilité particulière des enfants aux mesures d’atténuation, la détérioration de la santé familiale et des conditions économiques, l´augmentation du temps d’écran et de la dépendance aux médias sociaux, ou le deuil. Fait intéressant, nous avons également observé une diminution des tentatives de suicide dans les premiers mois de la pandémie pendant la période de confinement de mars 2020 en France, qui peut avoir résulté non seulement d’une surveillance parentale accrue, mais également de difficultés d’accès aux soins d’urgence.

Notre étude présentait certaines limites en ce sens qu’elle était monocentrique, sujette à un biais de représentativité et également insuffisante pour stratifier les patients par sexe. Seuls les patients âgés de 15 ans ou moins ont été inclus, ce qui limite la comparaison de nos résultats avec des travaux similaires incluant des patients âgés de 16 à 21 ans. Enfin, notre surveillance attentive des changements potentiels dans la santé mentale des enfants depuis le début de la pandémie peut également avoir conduit à une surestimation des résultats que nous avons rapportés.

En conclusion, nos résultats suggèrent que la pandémie de COVID-19 est associée à de profonds changements dans la dynamique des tentatives de suicide chez les enfants. Il est nécessaire de déployer rapidement des stratégies de prévention et d’intervention fondées sur des données probantes pour s’attaquer aux facteurs influençant les tentatives de suicide chez les enfants pendant et probablement après la pandémie.

Références

1. Meherali S, Punjani N, Louie-Poon S, et al.. Mental health of children and adolescents amidst COVID-19 and past pandemics: a rapid systematic review. Int J Environ Res Public Health. 2021;18(7):3432. doi: 10.3390/ijerph18073432 [PMCID: PMC8038056] [PubMed: 33810225] [CrossRef: 10.3390/ijerph18073432]

2. Hill RM, Rufino K, Kurian S, Saxena J, Saxena K, Williams L. Suicide ideation and attempts in a pediatric emergency department before and during COVID-19. Pediatrics. 2021;147(3):e2020029280. doi: 10.1542/peds.2020-029280 [PubMed: 33328339] [CrossRef: 10.1542/peds.2020-029280]

3. Yard E, Radhakrishnan L, Ballesteros MF, et al.. Emergency department visits for suspected suicide attempts among persons aged 12-25 years before and during the COVID-19 pandemic—United States, January 2019-May 2021. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. 2021;70(24):888-894. doi: 10.15585/mmwr.mm7024e1 [PMCID: PMC8220953] [PubMed: 34138833] [CrossRef: 10.15585/mmwr.mm7024e1]

4. Spiller HA, Ackerman JP, Smith GA, et al.. Suicide attempts by self-poisoning in the United States among 10-25 year olds from 2000 to 2018: substances used, temporal changes and demographics. Clin Toxicol (Phila). 2020;58(7):676-687. doi: 10.1080/15563650.2019.1665182 [PubMed: 31587583] [CrossRef: 10.1080/15563650.2019.1665182]

5. Cleveland RB, Cleveland WS, McRae JE, Terpenning I. STL: a seasonal-trend decomposition procedure based on LOESS. J Off Stat. 1990;6(1):3-33.

6. Tanaka T, Okamoto S. Increase in suicide following an initial decline during the COVID-19 pandemic in Japan. Nat Hum Behav. 2021;5(2):229-238. doi: 10.1038/s41562-020-01042-z [PubMed: 33452498] [CrossRef: 10.1038/s41562-020-01042-z]

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